Jean Dularge ↭ Bob Dylan (2019)

Interpretation and digital reconstruction of a performance's rehearsal by Rémi Bellart

Digital reconstruction of a performance originally produced by artist Rémi Bellart as part of his trans-disciplinary project Jean Dularge (1965-1966). Through his persona Jean Dularge, Rémi’s initial performance was a reenactment of a performance by Bob Dylan during a concert in Paris (1966) while he was trying in vain to tune his guitar, thus playing with the crowd expectations.

 

As part of a research-creation on the notions of archive, reenactment and memory, I proposed a personal interpretation of a former performance by artist Rémi Bellart (Jean Dularge) based on archives of a radio capitation and a rehearsal simulation that happened after the original public performance.

 

Through the aesthetics of ruin and disappearance, the video proposes a reflection on the indicial document of the recording of the performance. By the attempt to illustrate Peggy Phelan's idea that "The only life of performance is the present" (Unmarked: the policy of performance, 1993), Jean Dularge's body decimates, by triangulation of its archival digital material, as the tuning sound is revealed. Echoing the failed attempt of an ontological expression by the musician, the public is also decimated by trying to respond, with cries, comments, laughter or applause, to the vain effort of Jean Dularge.

 

"The pleasure of resemblance and repetition produces both psychic assurance and political fetishization. Representation reproduces the Other as the Same" (Peggy Phelan, Unmarked: the politics of performance, 1993).

 

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Interprétation numérique d’une performance initialement produite par l’artiste Rémi Bellart dans le cadre de son projet transdisciplinaire « Jean Dularge (1965-1966) ». La performance initiale de Rémi se voulait un "reenactment", par le biais de son persona Jean Dularge, d’une performance de Bob Dylan lors d’un concert à Paris (1966), tentant en vain d’accorder sa guitare et jouant ainsi avec les attentes du public.

 

Dans le cadre d'une recherche-création sur les notions d'archive, de reconstitution et de mémoire, j'ai proposé une interprétation personnelle d'une performance antérieure de l'artiste Rémi Bellart (Jean Dularge) basée sur les archives d'une capitation radiophonique et d'une simulation de répétition réalisée après la performance publique.

 

À travers l'esthétique de la ruine et de la disparition, la vidéo propose une réflexion sur le document indiciel issu de l’enregistrement de la performance. Dans le but d’illustrer la perspective de Peggy Phelan voulant que « la seule vie de la performance soit le présent » (Unmarked: the politics of performance, 1993), le corps de Jean Dularge se décime, par triangulation de sa matière numérique archivistique, dès que se manifeste son essence sonore. En écho à la tentative ratée d'une manifestation ontologique du musicien, le public se décime lui aussi en tentant de répondre, par des cris, commentaires, rires ou applaudissements, à l'effort vain de Jean Dularge.

 

Les deux pôles constituants de la performance, l’artiste et son public, se dissolvent donc au fil de la réitération des sons enregistrés et réactivés numériquement, trahissant l’ontologie de la performance selon laquelle celle-ci n’existe qu’à travers un lieu et une temporalité unique.

 

Cette affirmation expose l’un des deux axes de la grande dichotomie dans les études sur la performance qui oppose « le direct » à « l’enregistré ». Cette dichotomie est un espace de débat conceptuel et politique qui situe le degré de validité d’une performance, mais aussi sa valeur essentielle.

 

Le critique et philosophe Philip Auslander soutient conceptuellement la validité du document ethnographique issu de l'expérience phénoménologique. Il défend l'idée que le document est la performance, car elle est visitée (bien que de manière asynchrone) par un public. Plus précisément, il relève la « performativité de la documentation de la performance » (Auslander, 2006). La relation du public au document serait pour lui la seule vérité, en dehors de tout contexte socio-temporel. « La sauvegarde » n’est donc pas pour lui un frein à l’ontologie et à la validité de la performance, car le lien entre l’artiste et le spectateur est préservé à travers le document.

 

Cette vision est différente de celle de Peggy Phelan ou Richard Schechner (illustrée par cette vidéo), pour qui la valeur de la performance est dissoute dès sa reproduction. La performance non enregistrée est donc une pratique qui s’oppose à la performance médiatisée technologiquement. Cette vision prend racine dans un argument politique : « Le plaisir de la ressemblance et de la répétition produit à la fois une assurance psychique et une fétichisation politique. La représentation reproduit l'autre comme identique  ».

 

 

 

 

 

Digital reconstruction of a performance originally produced by artist Rémi Bellart as part of his trans-disciplinary project Jean Dularge (1965-1966). Through his persona Jean Dularge, Rémi’s initial performance was a reenactment of a performance by Bob Dylan during a concert in Paris (1966) while he was trying in vain to tune his guitar, thus playing with the crowd expectations.

 

As part of a research-creation on the notions of archive, reenactment and memory, I proposed a personal interpretation of a former performance by artist Rémi Bellart (Jean Dularge) based on archives of a radio capitation and a rehearsal simulation that happened after the original public performance.

 

Through the aesthetics of ruin and disappearance, the video proposes a reflection on the indicial document of the recording of the performance. By the attempt to illustrate Peggy Phelan's idea that "The only life of performance is the present" (Unmarked: the policy of performance, 1993), Jean Dularge's body decimates, by triangulation of its archival digital material, as the tuning sound is revealed. Echoing the failed attempt of an ontological expression by the musician, the public is also decimated by trying to respond, with cries, comments, laughter or applause, to the vain effort of Jean Dularge.

 

"The pleasure of resemblance and repetition produces both psychic assurance and political fetishization. Representation reproduces the Other as the Same" (Peggy Phelan, Unmarked: the politics of performance, 1993).

 

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Interprétation numérique d’une performance initialement produite par l’artiste Rémi Bellart dans le cadre de son projet transdisciplinaire « Jean Dularge (1965-1966) ». La performance initiale de Rémi se voulait un "reenactment", par le biais de son persona Jean Dularge, d’une performance de Bob Dylan lors d’un concert à Paris (1966), tentant en vain d’accorder sa guitare et jouant ainsi avec les attentes du public.

 

Dans le cadre d'une recherche-création sur les notions d'archive, de reconstitution et de mémoire, j'ai proposé une interprétation personnelle d'une performance antérieure de l'artiste Rémi Bellart (Jean Dularge) basée sur les archives d'une capitation radiophonique et d'une simulation de répétition réalisée après la performance publique.

 

À travers l'esthétique de la ruine et de la disparition, la vidéo propose une réflexion sur le document indiciel issu de l’enregistrement de la performance. Dans le but d’illustrer la perspective de Peggy Phelan voulant que « la seule vie de la performance soit le présent » (Unmarked: the politics of performance, 1993), le corps de Jean Dularge se décime, par triangulation de sa matière numérique archivistique, dès que se manifeste son essence sonore. En écho à la tentative ratée d'une manifestation ontologique du musicien, le public se décime lui aussi en tentant de répondre, par des cris, commentaires, rires ou applaudissements, à l'effort vain de Jean Dularge.

 

Les deux pôles constituants de la performance, l’artiste et son public, se dissolvent donc au fil de la réitération des sons enregistrés et réactivés numériquement, trahissant l’ontologie de la performance selon laquelle celle-ci n’existe qu’à travers un lieu et une temporalité unique.

 

Cette affirmation expose l’un des deux axes de la grande dichotomie dans les études sur la performance qui oppose « le direct » à « l’enregistré ». Cette dichotomie est un espace de débat conceptuel et politique qui situe le degré de validité d’une performance, mais aussi sa valeur essentielle.

 

Le critique et philosophe Philip Auslander soutient conceptuellement la validité du document ethnographique issu de l'expérience phénoménologique. Il défend l'idée que le document est la performance, car elle est visitée (bien que de manière asynchrone) par un public. Plus précisément, il relève la « performativité de la documentation de la performance » (Auslander, 2006). La relation du public au document serait pour lui la seule vérité, en dehors de tout contexte socio-temporel. « La sauvegarde » n’est donc pas pour lui un frein à l’ontologie et à la validité de la performance, car le lien entre l’artiste et le spectateur est préservé à travers le document.

 

Cette vision est différente de celle de Peggy Phelan ou Richard Schechner (illustrée par cette vidéo), pour qui la valeur de la performance est dissoute dès sa reproduction. La performance non enregistrée est donc une pratique qui s’oppose à la performance médiatisée technologiquement. Cette vision prend racine dans un argument politique : « Le plaisir de la ressemblance et de la répétition produit à la fois une assurance psychique et une fétichisation politique. La représentation reproduit l'autre comme identique  ».